Le père réclama le livre que Bianca avait apporté. Elle s’exécuta.
« - En effet, j’ai caché dans la couverture de cette édition unique un morceau de la carte qui m’a menée jusqu’ici.
– Mais pourquoi ne l’as-tu pas prise avec toi ? » demanda Bianca
– J’y viens, reprit son père. J’avais mémorisé mon parcours et je l’ai laissée pour éviter que quelqu’un d’autre ne s’en empare. Mais il se trouve qu’il y a de cela dix-huit ans, quand je vous ai quittés pour accomplir l’expédition citée par Jules Verne dans son fameux Voyage au centre de la Terre, il s’est produit un terrible accident qui m’a fait perdre la mémoire.
– Ce crash qui nous a laissé croire à ta mort ? » interrompit Matteo
– Effectivement, lui répondit son père, mais en réalité, je n’ai pas voulu faire croire cela, ce sont les médias qui ont inventé cette histoire de toutes pièces. Et c’est d’ailleurs en lisant un article de journal accompagné de ta photo, Bianca, que la mémoire m’est revenue peu à peu. J’ai fini par comprendre que ce crash n’était pas arrivé par hasard. C’est un homme au visage recouvert de tatouages maoris qui en est à l’origine. Il me suivait à bord d’un avion de chasse, il a tiré à plusieurs reprises sur le mien. J’avais très peur qu’il vous retrouve. C’est aussi pour cela que j’ai hésité si longuement avant de vous contacter. »
– Et ton expédition ? As-tu pu l’achever ? demanda Matteo, intrigué.
– Ma mission consistait à rejoindre le centre de la Terre en passant par la grotte souterraine qui se trouve en bas du volcan de Rangitoto. Regardez, il est juste derrière vous. A cet endroit précis doit se trouver un coffre enfoui. Grâce à vous, mes enfants, nous allons enfin le trouver. »
Bianca et Matteo se retournèrent et virent l’immense volcan se dresser devant eux. Sans plus attendre, la famille réunie prit la route pour achever cette expédition commencée presque vingt ans auparavant. Ils arrivèrent dans la grotte quatre heures plus tard.
Le père sortit l’ancienne édition du roman de Jules Verne, découpa soigneusement la couverture en cuir pour en sortir une partie du plan de la grotte. Il suivit les indications, fit cent pas, direction nord-est et se mit à creuser. Bianca et Matteo se joignirent à lui. Bientôt apparut le couvercle d’un coffre ancien. Émus, ils l’ouvrirent pour y découvrir une lettre. Abasourdi, le père se lamenta.
« Vingt ans de ma vie sacrifiés pour une simple lettre... »
Pourtant, piquée par la curiosité, Bianca l’ouvrit et la lut.
« Cher explorateur,
Toi qui as tant cherché, relevé des défis, vaincu les difficultés, tu es parvenu à la fin de cette aventure exceptionnelle. Comme tu le constates, il n’y avait rien d’autre dans ce coffre qu’un simple bout de papier. Ne sois pas déçu, tu penses sans doute avoir agi en vain mais cette aventure ne t’a-t-elle pas enrichi ? Peut-être auras-tu compris ce qui est essentiel dans la vie d’un homme. Sincères félicitations. Jules Verne »
Ils étaient encore sous le choc de cette découverte quand ils entendirent des pas. Ils avaient été suivis. Le coursier au visage tatoué se tenait derrière eux. Ils se précipitèrent vers la sortie de la grotte et eurent juste le temps de franchir le seuil qu’une pierre referma le passage, laissant le coursier prisonnier.