Depuis que Jules a fait découvrir sa passion pour Arthur Rimbaud à Rose, ceux-ci ne se quittent plus. Rose est impressionnée par les connaissances de Jules, elle admire sa facilité à parler du poète. Leur complicité est plus grande que jamais. Pourtant Rose sent que Jules ne lui a pas tout dit. En rentrant chez eux, les deux adolescents restent silencieux.
– Rose, lance Jules, je dois te dire quelque chose.
– Oui, je t’écoute répond Rose.
– Voilà, je fais partie d’une association. C’est une association qui lutte pour la liberté d’expression dans le monde. Elle s’appelle « libre comme Rimbaud ».
Rose écoute en silence. Jules regrette de ne pas lui avoir avoué plus tôt.
– C’est super, s’écrie finalement Rose.
– Oui, et j’aimerais te dire autre chose. Ce week-end, on organise une manifestation pour cette cause.... tu pourrais venir ?
Sans hésitation, Rose accepte. Elle se jette au cou de Jules, elle apprécie tellement son courage et son engagement.
Le jour de la manifestation est enfin arrivé. Il s’agit de défendre la liberté des femmes en Iran. Bien qu’admirative, Rose est angoissée à l’idée de participer à cette manifestation. Jules le sent, il la prend par la main et l’embrasse. Surprise, la jeune fille recule puis l’embrasse également.
La manifestation touche à sa fin. Exténuée mais ravie, Rose rentre chez elle. Le lendemain, l’adolescente retrouve Jules et les autres manifestants au siège de leur association. Une nouvelle manifestation est prévue dix jours plus tard sur la Canebière. Pour mobiliser le plus grand nombre de gens possibles, Jules et Rose impriment des tracts. La semaine passe rapidement. Rose est plus déterminée que jamais. Elle rejoint Jules sur le lieu de rendez-vous. En arrivant, Rose s’étonne de voir autant de monde. Les participants semblent déchaînés, ce qui l’effraie. Malgré tout, elle reste confiante, Jules est là, prés d’elle. Tous deux, main dans la main, avancent le poing levé, signe de Révolution.
Vive la liberté d’expression ! crient en cœur les manifestants.
Tous semblent unis et plus déterminés que jamais. Tout à coup des coups de feu retentissent. La sirène de police se fait entendre et un mouvement de panique s’empare de la foule. Affolée, Rose se retourne. Elle a perdu Jules de vue. Que se passe-t-il ? Où est-il ? Une bouteille explose à côté d’elle, entraînant une explosion sans précédent dans le quartier. Rose tente alors de sortir de cette jungle humaine. L’affrontement entre la foule et les forces de l’ordre semble interminable. Rose, perdue dans cette foule et folle d’inquiétude, tente de se frayer un chemin parmi les manifestants. Elle cherche désespérément Jules mais en vain. Elle hurle son prénom mais rien. Elle sent alors que son corps se dérobe sous elle : ses jambes tremblent, son cœur bat la chamade, des perles de sueur coulent sur son front. Tout son corps vacille. Retrouvera-t-elle Jules ? Elle poursuit ses recherches et finit par trouver un bout de tee-shirt où l’on aperçoit l’œil d’Arthur Rimbaud. Cette découverte amplifie son désarroi. Où est Jules ? Après plusieurs minutes de déambulation, Rose s’engouffre dans une ruelle déserte, saisit son téléphone portable et compose le numéro de Jules. Elle tombe sur sa messagerie. Il ne doit plus avoir de batterie, pense-t-elle. Le bruit est tellement fort qu’il ne l’entend peut-être pas. C’est alors qu’elle semble apercevoir une silhouette qu’elle reconnaît.
– Jules, Jules ! Crie-t-elle.
A ce moment -là, une foule passe, entravant la vue de Rose. La silhouette a disparu. C’était Jules, Rose en était certaine. Elle s’effondre. Reprenant ses esprit, elle se relève et décide de rentrer chez elle. Aucun nouvelle de Jules. Cela fait maintenant deux heures que la jeune fille est rentrée chez elle. Ses parents tentent de la rassurer mais elle voit bien qu’ils sont aussi inquiets qu’elle. Tout la soirée, elle garde son téléphone auprès d’elle. Les parents de Jules lui ont promis qu’ils l’appelleraient dés qu’ils auraient des nouvelles. C’est alors que la sonnerie de son téléphone retentit, le rap de Rat Luciano lui redonne espoir.
Rose a aujourd’hui vingt-cinq ans. Elle avance d’un pas hésitant, tenant par la main son compagnon. Plus elle avance, plus se doigts se crispent. Elle baisse les yeux.
– Qui est-ici ? demande le jeune homme qui lui tient la main
– C’est mon ami.... mon premier amour......., il s’appelait Jules.
Tous deux sortent du cimetière en silence. Rose caresse alors tendrement son ventre qui s’est arrondi. Leur petit Jules arrivera d’ici quelques semaines.