Avant que l’échange ne se termine, Tom avait eu le temps de sortir discrètement son portable et d’enregistrer la conversation. Ils n’auraient plus qu’à la transmettre à leur ONG qui se chargerait d’alerter les médias…Les trois garçons se réjouissaient d’avance de cette victoire, mais en attendant il fallait trouver le moyen de sortir de l’entreprise discrètement.
Mehdi, dont la cheville enflée ressemblait désormais à un baobab, s’appuya sur Joshua et Tom pour pouvoir avancer à cloche-pied. Par miracle, ils réussirent à déjouer les systèmes de sécurité et à atteindre la sortie. Daniel les attendait dans le pick-up, impatient de savoir ce qu’ils avaient appris à l’intérieur. Lorsque les garçons eurent fini leur récit, la radio se mit à jouer Imagine de John Lennon, tous se mirent à chanter à tue-tête, heureux de pouvoir participer à rendre le monde meilleur :
Imagine all the people sharing all the world,
You may say I’m a dreamer
But I’m not the only one
I hope some day you’ll join us
And the world will be as one
Avant la tombée de la nuit, ils atteignirent le village d’Aceh, situé sur la côte orientale de l’île de Sumatra, où le reste du groupe les attendait. Avant d’arriver, ils purent admirer la végétation luxuriante et dense qui avait repris ses droits depuis le Tsunami de 2004. Mais ils constatèrent aussi les ravages provoqués par les incendies des puits de pétrole illégaux que les habitants exploitaient pour pouvoir vivre. Arrivés au campement, les autres membres du groupe leur avait préparé un accueil digne de champions de Formule 1. Chacun put raconter ses aventures et ses impressions.
Léa raconta comment ils étaient allés à la rencontre des habitants du village pour les sensibiliser aux dangers de l’exploitation pétrolière non autorisée. Ils avaient également rencontré des dirigeants locaux qui avaient paru sensibles aux arguments avancés par les jeunes.
Naomie avait prévu une dernière surprise pour eux : elle avait installé, à l’écart, des tapis de sol pour que tous puissent se reposer et admirer les étoiles. Et, pour qu’ils se remettent de leurs émotions, elle leur tendit des barres chocolatées bio issues du commerce équitable. « Et voilà, un Mars et ça repart ! », leur dit-elle en rigolant.
Tous repensèrent à leur odyssée et à ce temps désormais révolu où la planète importait peu à leurs yeux, où le Nutella était la base de leur alimentation, où ils étaient encore des enfants.
Le lendemain, direction l’aéroport, chacun retournait dans son pays d’origine, tout en se promettant de rester en contact. Alors que Daniel, Tom, Léa et Mehdi attendaient, épuisés, dans la salle d’embarquement, leur attention fut attirée par les voix d’un jeune couple qui échangeait en français. Heureux de retrouver des congénères, ils engagèrent la conversation. Pierre et Julieta parcouraient l’Asie depuis septembre. Touchés par l’aventure des ados, Pierre proposa de les contacter très prochainement pour raconter leur périple dans le journal Libération, auquel il collaborait.
Quelques mois plus tard, ils reçurent un exemplaire du journal, mais également un livre vert intitulé Ces jeunes qui changent le monde : Tom et Mehdi s’écrièrent « Trop bien ! », mais Léa, en bonne Lyonnaise, fut un peu déçue : « c’est quoi ce vert, on dirait un livre sur l’ASSE ! »...