Il était désormais 14 heures. Seule l’ultime porte demeurait toujours fermée. Un étrange silence régnait. Dragovitch sortit la clé, elle était grande, dorée avec un petit diamant serti dessus.
Le chef mafieux, bien que rempli d’assurance, hésita un instant à insérer la clé dans la serrure. Il repensa à la surprise qui les attendait derrière la porte précédente ; il repensa à Marthe. Dragovitch, ne voulant pas prendre de risques, envoya Bianca tourner la clé à sa place. Celle-ci avait peur qu’il lui arrive la même chose qu’à Marthe. Mais, désormais, elle n’avait plus le choix. Elle ressentit à ce moment-là comme un nœud dans le ventre. Elle saisit la clé dans ses mains moites, se dirigea vers la porte, son cœur se mit à battre de plus en plus intensément et les images du cyclope dévorant Marthe vinrent heurter son esprit. Elle se retourna vers son frère et le regarda peut-être pour la dernière fois dans les yeux.
Bianca se retourna vers la porte. Elle inséra la clé dans la serrure et tourna la poignée. Rien ne se passa. Le temps s’écoulait ; la peur pouvait se lire sur le visage d’Ernesto et une larme coula de la joue de la jeune fille...Son frère s’approcha pour saisir sa main et la serra très fort, signe de force et de courage. L’idée de la mort la terrorisait, lui, était plus calme croyant en la vie malgré tout.
Dragovitch était fou de rage, il était persuadé que le trésor l’attendait, là, de l’autre côté de la porte. Perdant toute prudence, il s’approcha et se rendit compte qu’il y avait deux serrures sur la porte au lieu d’une. Il prit alors violemment la vieille clé massive, dorée et lourde des mains de Bianca et l’inséra dans l’autre serrure. Il tourna la clé. Le diamant qui y était inséré se mit à briller davantage, comme un éclat d’étoile.
Un bruit mystérieux retentit dans toute la grotte. Une lueur d’espoir insensé se voyait dans le regard de Dragovitch. Tous les autres se regardaient, absolument silencieux, avec angoisse, cherchant à comprendre d’où venait ce bruit si inquiétant. Bianca et Ernesto et les hommes de Dragovitch fixaient attentivement la porte.
Enfin, Dragovitch tourna la clé à nouveau- nouvel éclat d’étoile. Il n’eut pas besoin de pousser la porte, elle s’ouvrit d’elle-même, lentement, lourdement. Elle s’ouvrit sur une grande pièce sombre. Dragovitch sentait que sa récompense n’était plus très loin, et, sans prendre aucune précaution, il s’élança dans la pièce sombre avec ses hommes.
Un énorme coffre était entreposé au milieu de la pièce. Dragovitch, exalté, s’empressa de l’ouvrir et ses yeux s’émerveillèrent. Des milliers de pièces dorées scintillèrent devant lui. Ses hommes de main et lui commencèrent à se remplir les poches, ce qui laissa Bianca et Ernesto sans surveillance.
Alors que les mafieux s’emplissaient les poches, une secousse retentit, ils restèrent tous immobiles. Alors, une deuxième secousse, plus forte encore, fit trembler la caverne. Pendant les secondes qui suivirent, il ne se passa rien, mais tout à coup, un grondement horrible partit de la porte. La terre trembla et fit tomber par terre tous les hommes de Dragovitch ainsi que Bianca et Ernesto. Le sol trembla de plus belle. Bianca et Ernesto s’enfuir dans un sursaut de volonté de vivre. Les mafieux, quant à eux, restèrent quelques secondes de plus, quelques secondes de trop, victimes de leur avidité.
Bianca et Ernesto eurent tout juste le temps de récupérer la clé sur la porte et de sortir alors qu’un éboulement bloquait l’entrée de la caverne.
Par la suite, le vacarme se calma et Bianca et Ernesto, effrayés, virent avec stupeur que de la clé émanait une lueur. Abasourdis par les événements, reprenant leur souffle et tentant de se calmer, ils aperçurent une mince ouverture se dessiner sur son côté. Ils se posèrent des questions. Puis, tout à coup, ils virent la clé s’ouvrir totalement, se fendant en deux. Bianca et Ernesto découvrirent que l’intérieur de la clé était recouvert de diamants. Ils comprirent alors qu’il n’y avait pas de cité d’or mais que le trésor était la clé, recélant ces diamants que les anciens Grecs prenaient pour les larmes des Dieux ou pour des éclats d’étoiles.
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histoire 5
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5/ Clé de l’énigme et éclat d’étoiles...
26 février 2013, par Collège Le Plan du Loup -
4/ Sur la piste de la Cité
21 janvier 2013, par Collège Eugénie de Pomey, Collège Eugénie de PomeyDans l’appartement de Bianca, installées devant une tasse de café, Bianca et Marthe discutaient d’un imminent départ pour se cacher quand elles entendirent frapper à la porte. Les deux jeunes femmes, paniquées par ce son, prirent des armes de fortune : Bianca saisit un couteau dans le tiroir de la cuisine ; Marthe prit la première poêle qui lui tombait sous la main. Malgré sa peur, Bianca lança un sourire à Marthe et éteignit la lumière.
Elles avancèrent dans la pénombre et se placèrent de chaque côté de la porte. Bianca ouvrit la porte, Marthe frappa violemment l’inconnu sur la tête. Il s’effondra à terre, inconscient. Les jeunes femmes regardèrent s’il n’y avait personne d’autre et refermèrent la porte. Bianca alluma la lampe…
« Ernesto ! s’écrièrent-elles, surprises.
– Oh grrrh, marmonna l’assommé.
– Ça va ? Je ne t’ai pas frappé trop fort ? demanda Marthe, lui tapotant la joue.
– Aïe, aïe, arrête ! Charmant accueil… »
Bianca sortit des glaçons du frigo et les appliqua sur la tête du blessé.
Après quelques instants, la jeune traductrice interrogea son frère à propos de la clé et de toute cette affaire.
« La clé ouvre la porte d’une cité mythique en Russie, au cœur du Caucase. Dragovitch veut piller la cité et s’enrichir. Je veux sauver ce trésor historique et archéologique des pillards. J’ai besoin de vous deux pour déchiffrer les … »
Soudain, les hommes de Dragovitch enfoncèrent la porte. Les cinq bandits, armés jusqu’aux dents, exigèrent la clé en les menaçant.
Ils se protégèrent derrière un bureau. Deux hommes les surveillaient, les tenant en respect pendant que trois autres mafieux fouillaient l’appartement. Marthe fixa le plafond, anxieuse. Boris, un de leurs gardiens, suivit le regard de la jeune femme. Il remarqua qu’une des plaques du plafond était mal repositionnée.
Il demanda d’une voix brusque au groupe ce qu’il y avait au dessus d’eux. N’attendant pas la réponse, il grimpa sur le bureau. Boris souleva la plaque et vit l’enveloppe épaisse. Il la prit et la montra au chef. L’homme saisit le pli de ses grosses mains et l’ouvrit. A l’intérieur, se trouvait la clé de la cité.
« Départ pour tous : direction le Caucase, dit-il d’une voix rauque. »Bianca, Marthe et Ernesto furent trainés jusqu’à une voiture qui les conduisit à Roissy. Là, ils prirent un avion privé pour le Caucase.
Dès qu’ils descendirent du jet, ils se trouvèrent nez-à-nez avec Dragovitch, qui les accueillit avec un sourire démoniaque.
« Finalement, j’ai réussi à avoir cette clé, dit Dragovitch d’une voix sournoise à Ernesto. Vous êtes ici parce que j’ai besoin de vous : Ernesto, tu nous aideras à descendre dans la grotte et nous verras piller ta chère cité que tu veux tant préserver. Bianca, tu me serviras à déchiffrer les écritures anciennes. Quant à toi, Marthe, tu redeviendras ma femme. »Ils passèrent la nuit dans une auberge.
De grand matin Bianca, Ernesto, Marthe et Dragovicth prirent la route pour rejoindre cette montagne si mystérieuse. A l’arrière de la camionnette, le voyage fut pénible car ils étaient secoués dans tous les sens, la route étant sinueuse et bosselée. Un coup de frein brutal marqua la fin du périple. Ils étaient arrivés au pied de la montagne. Ils sortirent du véhicule, et furent contents de respirer enfin un peu d’air frais. Sans attendre, les hommes de Dragovitch les poussèrent dans l’hélicoptère qui les attendait pour les mener au sommet. Il décolla aussitôt. Arrivés en haut, on les conduisit à l’entrée d’une grotte sombre. Dragovitch répartit les équipements et les lampes et obligea Ernesto, le spéléologue, à prendre la tête du groupe pour leur servir de guide pour cette exploration. Après avoir rampé le long d’un tunnel humide, ils furent obligés de s’encorder pour descendre en rappel jusqu’à une salle voutée.
Là, ils se trouvèrent devant une grande porte en chêne blanc, fermée par une vieille serrure rouillée. Dragovitch sortit la clé de sa poche et l’inséra avec difficulté dans la serrure. Il essaya d’ouvrir mais n’y parvint pas. Furieux, il donna un grand coup d’épaule dans la porte, sans succès. Il fit alors appel à Brutus, son homme de main le plus fort, qui enfonça la porte d’un coup de pied. Le bois craqua et céda. Le groupe entra dans une nouvelle cavité sombre. Une rapide exploration leur permit de découvrir dix portes qui les encerclaient. Chacune d’elles comportait un symbole et une phrase en cyrillique ancien, mais ni poignée ni serrure. Dragovitch ordonna à Bianca de traduire ces phrases que lui-même ne pouvait déchiffrer car la langue était trop ancienne.
Bianca commença à traduire les premières phrases, une par une. Elle comprit ainsi que certaines portes ne menaient pas à la cité. Il en resta deux pour lesquelles elle n’était pas sûre de la traduction. Elle fit alors appel à Marthe pour examiner les symboles. Celle-ci voulut toucher ces formes incrustées dans la pierre, s’appuya sur la porte, ce qui enclencha par inadvertance un mécanisme. Un grincement aigu retentit dans la pièce et la porte s’ouvrit brusquement. Marthe perdit l’équilibre et tomba dans un grand trou noir, on entendit sa voix résonner entre les parois du gouffre. Dragovitch et ses coéquipiers se penchèrent en pointant leur lampe torche dans le vide. Là, ils virent une grosse tête immonde apparaître, puis un corps hideux s’approchant de Marthe. Ce monstre à l’œil unique s’avançait en direction de Marthe en poussant des grognements et en brandissant une massue de la taille d’un tronc d’arbre. En même temps, il fracassa la paroi de la grotte et en arracha un rocher gigantesque. Il se dirigea vers sa proie, la menaçant de son rocher. Les hommes de Dragovitch eurent beau lui tirer dessus : sa peau était tellement dure que les balles ne faisaient que ricocher dessus sans aucun effet ! Marthe, terrorisée, tenta désespérément d’escalader la paroi. Essoufflée, elle n’y parvint pas et essaya de s’enfuir à quatre pattes, cherchant un refuge dans un coin de la grotte. Malheureusement, elle ne put échapper au cyclope qui lança le bloc de pierre. L’infortunée jeune femme fut aussitôt écrasée. Dragovitch laissa échapper un hurlement de rage et de tristesse. Horrifiés par ce spectacle, les hommes de Dragovitch fermèrent aussitôt la porte, pour ne pas subir la fureur de ce monstre. Tout le monde se retrouva dans la grande salle, pâle, tremblant, à la limite de la nausée. Bianca était effondrée sur le sol en sanglot. Dragovitch se reprit , se saisit d’une arme et visa Bianca qu’il tenait pour responsable de la mort de Marthe. Mais un de ses hommes de main se mit devant la jeune traductrice et lui dit : « arrêtez chef, nous pourrions encore avoir besoin d’elle ! ».
Enervé, Dragovitch se tourna alors vers la porte restante… -
Les livres parlent d’eux-mêmes...
10 décembre 2012, par Collège Jacques Coeur, College Jacques CoeurElle la pose sur la table et l’observe attentivement. A l’intérieur de celle-ci, on peut distinguer les lettres « B » et « M » déformées. Les questions se bousculent dans sa tête : « Pourquoi des lettres ? » , « Pourquoi cette deuxième enveloppe ? »... Résolue à éclaircir tous ces mystères, elle ouvre la petite enveloppe brune et y trouve la phrase manuscrite : « Certaines lettres peuvent en cacher d’autres, les livres parlent d’eux-mêmes... ». Intriguée encore davantage par ces quelques mots, elle veut relire la lettre de son frère pour y trouver d’autres indices et se souvient... de la clé ! Elle prend l’objet et l’observe avec attention. Elle voit qu’elle est abimée, rouillée et vieillie. D’où peut-elle venir ? Ces deux lettres ont-elles un rapport avec cet objet, ou avec la phrase trouvée dans l’enveloppe ? Tout cela était vraiment compliqué..!
Bouleversée par la somme de ces éléments, Bianca va se coucher. Quelques heures après avoir essayé de s’endormir vainement, elle allume, fébrile, son ordinateur et fait des recherches. Elle réfléchit à la raison pour laquelle son frère lui parle de "livres". Elle continue sa réflexion : "Les livres parlent d’eux-mêmes"... Depuis tout petit, Ernesto était fasciné par le livre « Voyage au centre de la Terre ». Elle regarde donc dans cet ouvrage qui lui réserve décidément de grandes surprises, et trouve un lien avec deux des personnages : M pouvait être l’initiale de "Marthe", la gouvernante de la maison dans le roman de Verne ; et B, celle du nom de famille du chasseur Bjelke. Ces deux noms accolés lui disaient quelque chose... Mais oui, Marthe Bjelke ! Marthe Bjelke, qui avait étudié avec elle à la faculté de langues où se trouvait également son frère à l’époque ! Ce dernier, tentait-elle de se souvenir, s’était lié d’amitié dès la 1ère année, avec un élève nommé Drazhan Maravitch, arrivé au milieu de l’année... et Marthe était son autre grande amie de l’époque : car Ernesto n’était pas du genre très sociable, ses amis se comptaient sur les doigts d’une main : pas étonnant qu’il soit devenu spéléologue, il adorait partir seul à l’aventure des grottes. Ces trois-là étaient devenus inséparables, tellement inséparables que Drazhan et Marthe s’étaient rapprochés de plus en plus, et avaient fini en couple. A la fin de leurs années d’études, le trio s’était finalement divisé : Ernesto avait changé sa voie d’études, il avait engagé sa carrière de spéléologue en Ardèche. Le couple, quant à lui, était parti en Russie car Drazhan avait dû reprendre les affaires familiales et Marthe ne voulait pas se séparer de lui.
Bianca se mit résolument en quête de Marthe : que pouvait-elle faire d’autre ? Le fait que son frère ait codé son message l’inquiétait beaucoup : il était assurément en grand danger... Elle trouva sur internet que cette dernière tenait finalement un magasin de tatouages rue des Lavandes, à Paris-même : encore un lien étrange, cette fois avec le coursier de la lettre... Elle décida d’aller à sa rencontre. Diverses questions l’inquiétaient : que pouvait ouvrir cette clé massive, rouillée ? Cet objet était-il précieux au point d’avoir mis en danger son frère ? Bianca ne se trouvait-elle pas à son tour en danger, en possession de cet objet mystérieux ? Elle espérait que Marthe répondrait à tous ses doutes, à toutes les questions qui l’agitaient, et qu’elle l’aiderait notamment à « sauver » Ernesto des griffes de Dragovitch.
Arrivée au 28 rue des Lavandes, elle trouve vite le magasin : un lieu sinistre, obscur, avec une grande avancée rouge qui lui donnait un air asiatique. Elle entre lentement : le lieu est vide, l’odeur de l’encens embaume la petite pièce noire. Malgré l’obscurité qui règne, Bianca peut distinguer plusieurs modèles de tatouages qui ont un air gothique : serpents, dragons, roses... Certains lui semblent sans signification car ils représentaient de seules lignes enchevêtrées à ses yeux. Mais en les regardant plus intensément, elle remarque, alors, que le coursier semblait avoir les mêmes « traits » sur son visage. Outre ces inquiétants tatouages, une chose l’interpelle : les volets sont tous fermés. Pourquoi… ? Marthe aurait-elle peur de quelque chose ? Les seules faibles sources de lumière lui sont procurées par quelques chandelles et lampes à huile. Cette pièce, à elle seule, lui dit que Marthe est une personne très mystérieuse.
??! Elle entend du bruit dans l’arrière-boutique ! S’approche alors et voit une ombre rouge et dorée. « Excusez moi ? ». Une jeune femme aux cheveux bouclés et très fins s’approche. Elle a l’air fatigué. C’est Marthe, qui ne la reconnaît pas. Bianca tente de nouer un dialogue :
" Marthe ? Marthe Bjelke ?
– Qui êtes-vous ? demande la femme blonde sur un ton ferme.
– Je suis la soeur d’un de vos anciens amis, Ernesto Fuocco.
La femme se radoucit d’un seul coup.
– Bianca ? C’est ça ?! Bianca !
– Oui, je viens vous poser quelques questions au sujet de mon frère en danger, il ...
– Viens t’asseoir, s’il te plait, la coupe-t-elle."
Marthe tire alors la jeune femme vers une table basse entourée de deux petits tabourets. La tatoueuse la fait asseoir, lui sert du thé ainsi qu’à elle même, puis prend place à son tour. Sous son allure étrange et fatiguée perce de l’inquiétude :
" Que puis-je faire pour toi, Bianca Fuocco ?
– Eh bien voilà : il y a quelques heures de cela, j’ai reçu un colis avec, à l’intérieur, une lettre et une mystérieuse clé.
La femme se crispe d’un seul coup.
– Cette lettre, poursuit Bianca, ne m’annonce guère de nouvelles réjouissantes. Lisez-la s’il-vous-plait."
Marthe saisit la lettre d’une main tremblante et commence à la lire. Une fois sa lecture finie, elle rend la missive à son propriétaire, tremblante, larmes aux yeux mais dureté dans le regard. Marthe est la deuxième clé du problème, se dit Bianca, cette femme sait où est Ernesto et ce qui lui arrive.
" Tu veux des réponses à tout ceci n’est-ce pas ? devine la tatoueuse.
– C’est exact. Enfin, si vous en avez ?
– Laisse moi te raconter depuis le début : comme tu dois le savoir, ton frère, Ernesto, Drazhan et moi nous sommes séparés à la fin de nos études à l’université, il y a une dizaine d’années de cela. Drazhan devait rejoindre la Russie afin de reprendre les affaires familiales, son père étant décédé. Amoureuse, je l’avais suivi...
– Que faites-vous là ? Quel rapport avec Ernesto, si vous ne l’avez pas revu depuis tout ce temps ?
– Laisse moi finir... Nous avions une vie paisible, les affaires de Drazhan allaient à merveille, jusqu’au jour où deux hommes en costume noir vinrent le voir. Ils s’enfermèrent dans le bureau de Drazhan et discutèrent. La discussion dura de longues heures. A leur sortie, Drazhan me dit qu’il avait besoin d’un spéléologue pour une affaire urgente. Décidé, il pensa immédiatement à notre vieil ami Ernesto, ton frère. Nous revînmes en France afin d’aller le chercher et de fêter des retrouvailles exceptionnelles. Nous le trouvâmes assez facilement. Une fois la chose discutée, Ernesto plia instantanément ses bagages. Seul Ernesto et Drazhan connaissaient les détails de ce projet d’exploration mystérieux : je n’ai jamais été mise au courant. Quelques semaines plus tard, après notre retour en Russie, Ernesto et Drazhan partirent tout deux tôt le matin pour « leur aventure ». Je me réjouissais d’un tel hasard qui nous faisait retrouver un ami, mais Drazhan me semblait tendu au sujet de cette affaire de grotte. Ces hommes vêtus de noir me restaient en tête comme des présages funestes. Leur expédition dura plusieurs jours. Quand ils revinrent, ils avaient trouvé cette fameuse et maudite clé, que tu as en ta possession.
– Savez-vous de quoi il s’agit ? Ce qu’elle ouvre ?
– Je me souviens avoir écouté leur conversation à ce sujet. Drazhan avait émis l’hypothèse que celle-ci ouvrait une porte derrière laquelle se trouverait un trésor inestimable. Ernesto, lui, avait opté pour une solution plus scientifique. Il pensait que cette clé ouvrait un passage derrière lequel se trouvaient sûrement les traces d’une ancienne civilisation. Et c’est là que tout commença...
– Quoi donc ?
– Un soir, il y eut une violente dispute. Drazhan, avide de richesses et de pouvoir, voulait la clé pour lui seul. Ernesto, qui voulait aussi s’octroyer le mérite de cette découverte, refusa et s’enfuit avec la clé, après l’altercation qui avait tourné en bagarre. Il voulait être sûr que Drazhan n’allait pas en faire un mauvais usage. Mon mari était fou de rage. Ces hommes en noir : il obtint d’eux, hommes de la mafia russe, de pouvoir tout bonnement éliminer Ernesto, et récupérer la clé. Plus les jours passaient, et plus Drazhan devenait violent. Je n’en pouvais plus, et ayant eu peur pour ma vie, je réussis à m’enfuir et à regagner la France. Drazhan me recherche moi aussi…
– Mais si cette histoire concerne seulement Drazhan et Ernesto, qui est ce Dragovich ?
– Tu n’as toujours pas compris ? hoqueta-t-elle. Drazhan est Dragovich !"
Marthe éclata alors en sanglots. Les yeux de Bianca restaient secs : une peur viscérale la coupait de toute émotion autre. Un trésor voulu par la mafia russe… Une traque qui allait sans doute se diriger contre elles aussi à présent... -
2/ De l’importance d’une feuille mystérieuse, d’une lampe et d’une lettre
17 octobre 2012, par Collège Jean Jaurès, Collège Jean JaurèsSoudain, le téléphone se met à sonner. Bianca pose l’enveloppe et décroche le combiné.
– Bonjour. Madame Taschen à l’appareil.
– Ah… Bonjour… Madame…
– J’espère que vous avez fini la traduction que je vous ai demandée !
– Euh…
Bianca s’affole, oh non, pas elle… je l’ai mise où d’ailleurs cette fichue notice… ?
– Oui… je l’ai presque terminée. Normalement elle sera prête demain…
– Comment ça normalement ?! Vous devriez l’avoir finie depuis hier !
– Heu, c’est que… j’ai été pas mal occupée aujourd’hui. Mais je vais m’y mettre, et j’y passerai toute la nuit s’il le faut.
– Ah oui ?! Et… vous avez quelque chose de plus important que votre travail ?! Si jamais vous ne me transmettez pas la notice au plus vite, vous pourrez dire au revoir à votre salaire !
– Non… non… Vous l’aurez demain matin…
– Je l’espère bien mademoiselle Fuoco ! Au revoir !
– Au revoir… …
Mais Madame Taschen ne l’entend plus. Elle a déjà raccroché.Après cet affreux coup de fil, Bianca se remit au travail. Elle releva ses cheveux à nouveau et y replaça le pinceau en guise d’attache. Puis elle se plongea avec une passion forcée dans le fonctionnement de cette lampe, dite révolutionnaire. Ce n’était pas si compliqué d’appuyer sur un bouton et de mettre des piles. À la nuit tombée, elle acheva sa traduction. Alors, exténuée, elle fuma une cigarette tout en songeant à ce prototype de lampe qu’on lui avait envoyé. Elle se mit à sa recherche, il devait bien se trouver quelque part dans les tiroirs du bureau. C’était un peu trop tard pour l’aider dans son travail mais ce pouvait être amusant de la tester. Elle s’en saisit et joua à l’allumer et à l’éteindre. A l’allumer. A l’éteindre… Le faisceau lumineux éclaira Voyage au centre de la Terre qui était toujours posé au milieu de ses affaires, comme une invitation à s’évader. La couverture de l’ouvrage édité chez Hetzel, datant de 1876, fit briller ses parures dorées ; le soleil au centre se mit à scintiller dans la pénombre de la pièce. Attirée, Bianca feuilleta le livre, orienta la lumière sur les pages, rêvant d’expéditions lointaines. C’est alors qu’elle tomba sur la feuille de l’arbre, celle qui était arrivée mystérieusement à son appartement.
Sous les rayons de la lampe de poche, la feuille se couvre d’un dessin étrange, ses nervures sont rouges et on peut apercevoir la forme d’un « S » entouré d’arabesques, comme des flammes ondulées. L’ensemble fait penser à un corps d’animal griffu, affublé d’une gueule menaçante. Un dragon peut-être. Un dragon dessiné, tatoué… Et soudain, elle repense au coursier mystérieux.
Dans son souvenir, la figure de l’homme était couverte d’un tatouage vert bouteille. C’était une longue ligne qui séparait son visage dans le sens de la longueur et de façon symétrique, puis le trait se divisait en plusieurs branches fines. Maintenant qu’elle y pense, ces dessins ressemblaient étrangement aux nervures de la feuille qu’elle tient dans sa main. Sur ces lignes on devinait des caractères anciens, des runes peut être. Et les yeux de l’homme, couleur fauve, rappelaient le ton de cette feuille d’automne. Le souvenir du coursier ramena brusquement Bianca à l’enveloppe dont elle n’avait toujours pas vu le contenu.
La jeune femme finit donc d’ouvrir le paquet et trouve, à l’intérieur, une autre enveloppe, plus petite, ainsi qu’une clé et qu’une lettre pliée en deux. Ce courrier l’attire, elle veut le lire en premier car elle a reconnu l’écriture de son frère.
« Ma chère Bianca,
Je suis très heureux de pouvoir enfin t’écrire. Mais passons la politesse car j’ai peu de temps. La clé ci-jointe est unique, ne la montre pas et cache-la précieusement dans un endroit où personne ne pourra la trouver. Je ne peux te révéler ma position exacte, cependant, sache que je suis quelque part en Russie, non loin d’une grotte où j’ai trouvé cette clé. Depuis, je suis poursuivi par des gens dangereux qui sont sous les ordres d’un certain Dragovitch.
Je reviens au plus vite. Fais attention à toi.
Ton frère,
Ernesto Fuoco. »A ces mots, le sang de Bianca ne fait qu’un tour, elle ne sait pas quoi faire. Doit-elle partir à la recherche d’Ernesto, ou bien l’attendre rue des Vinaigriers ? Mais son regard tombe sur le petit rectangle brun : alors, le cœur battant à tout rompre, elle décachète la toute petite enveloppe.
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Une étrange enveloppe
17 octobre 2012, par Maylis De KerangalSur le palier, un homme lui fait face, vêtu de noir, le blouson siglé du logo d’une entreprise de coursiers qu’elle ne connaissant pas, et coiffé d’un casque intégral qu’il n’a pas pris la peine de retirer. Elle se fige bras croisée : oui ? Le type articule quelque chose qu’elle n’entend pas tout en lui tendant une enveloppe de papier kraft. Elle grimace, pointe un index sur son oreille : oh hé, ça vous dérangerait d’enlever votre casque ? Le type s’exécute, glisse l’enveloppe entre ses genoux tandis qu’il ôte son casque, révélant un visage tatoué — un visage que le tatouage rendait indécelable. Bianca Fuoco ? Voix enterrée, fortement accentuée. La jeune femme, interdite, hoche la tête, alors reçoit l’enveloppe dans les bras mais, le temps de la retenir et d’y jeter un œil, ahurie, l’homme tourne les talons et dévale les escaliers.
La porte refermée, Bianca s’immobilise quelques secondes, haletante, main sur la clenche, tête penchée vers le chambranle, oreille tendue vers la cage d’escaliers quand ses yeux, eux, inspectent l’enveloppe — une poche épaisse, scellée par un ruban de Chatterton marron, et muette, aucune inscription, rien, pas même son nom, pas même le code de l’immeuble — puis, le bruit des pas s’amenuisant, elle se précipite à la fenêtre, colle son front contre la vitre, et sans savoir pourquoi, commence de guetter le coursier qui, logiquement, ressortirait de l’immeuble six étages plus bas, pour remonter sur sa bécane, et filer.
Elle patiente, piétine, c’est long, plus long qu’elle ne l’aurait pensé, l’enveloppe est serrée contre sa poitrine, le verre est glacé contre son visage et son angle de vue très aigu, mais elle attend, garde les yeux baissés sur la portion de rue que l’homme traversera pour atteindre son scooter, et, juste en face, il y a toujours cette corneille noire qui défile comme à la parade, levant haut les pattes comme un soldat lors de la relève de la garde à Buckingham Palace. Alors le coursier est apparu, les habits noirs, le casque intégral sur la tête mais les cheveux longs flottant dans son dos jusqu’aux reins, les semelles de ses baskets touchant à peine l’asphalte quand il franchit la chaussée, et une fois au pied de sa machine elle le voit qui zippe son blouson, enfile ses gants, se place sur la selle en un mouvement de voltige, souple, rapide, un félin, puis s’incline en avant pour démarrer le moteur, quand, alors que rien ne le laissait prévoir, il a subitement pivoté le buste, fait volte-face vers l’immeuble et renversé la tête en arrière, comme pour regarder à la fenêtre de son studio, surprise elle pousse un cri, se recule, finissant même par s’esquiver derrière le rideau, où retenant sa respiration, elle observe le coursier : il ne démarre pas mais continue de fixer sa fenêtre, comme s’il savait qu’elle était là, cachée, l’enveloppe de plus en plus comprimée contre son corps, puis brusquement, faisant vrombir son moteur, il se détourne, s’élance dans la rue qui résonne comme un défilé rocheux, et disparait. Alors, reprenant ses esprits, Bianca saisit les ciseaux sur l’étagère, et cœur battant à tout rompre, ouvre l’enveloppe.
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